Interview Matthieu Gaujard

Rencontre avec le directeur du Pullman Paris Bercy , un hôtelier aguerri, qui le temps d’une interview m’a fait le plaisir de partager son expérience et de décoder les nouvelles aspirations des talents dans une industrie hôtelière qui doit plus que jamais réussir à s’adapter.

Après l’obtention de son BTS au lycée hôtelier de Blois, Matthieu obtient son premier MBA à l’ESSEC et son deuxième 20 ans plus tard au sein de l’ESCP.

Il débute sa carrière en tant que maitre d’hôtel puis en tant qu’assistant du directeur de la restauration pour progressivement monter les échelons et devenir directeur de la restauration au Scribe. Il se détache ensuite de l’étiquette purement F&B et accède alors au poste de directeur général. Fonction qu’il exercera successivement dans différentes marques du groupe Accor à savoir : Novotel, Sofitel & Pullman , marque au sein de laquelle il assure aujourd’hui la direction de l’hôtel Pullman Paris Bercy.

Les talents d’hier ne sont plus ceux d’aujourd’hui

Matthieu constate une raréfaction des talents sur le marché. Selon lui, de nombreuses écoles hôtelières spécialisées aujourd’hui en “hospitality management” ne se concentrent plus sur les métiers opérationnels de l'hôtellerie, ce qui complique le recrutement pour des postes clés tels que chefs de rang, cuisiniers ou réceptionnistes.

Ainsi, il fait le choix de privilégier désormais des écoles plus opérationnelles où les talents souhaitent faire carrière en hôtellerie .

Cette pénurie de talents se reflète dans les candidatures dont 70% aujourd’hui proviennent de profils qui n'ont pas suivi de formation hôtelière. Matthieu alerte sur ce phénomène qui peut créer des lacunes importantes et complexifier la gestion managériale . Il estime également que les groupes hôteliers ne peuvent pas assurer seuls la formation complète de ce type de profils non issus de l’hôtellerie.

Se démarquer pour attirer

Afin d’attirer de nouveaux talents, Matthieu peut compter sur la force de frappe du groupe Accor dont Pullman fait partie. En effet le siège du groupe met régulièrement en place différentes initiatives pour se différencier telles que :

  • “Jobs au Talent !” . Cette initiative dont le but était de retirer tous les freins à la candidature (aucun CV n’était demandé au préalable) réunissait candidats & recruteurs autour d’ateliers & de jeux de rôle. Des mises en situation qui ont permis aux recruteurs de pré-qualifier efficacement les candidats.

  • “Carré W.I.P” . Accor organise également régulièrement des Afterworks pour attirer autrement les talents de l’industrie.

Ces nouveaux formats ont prouvé leur efficacité et contribuent à l’attractivité du groupe.

Matthieu estime que l’hôtellerie doit également s’adapter à l’évolution des aspirations des jeunes talents qui ont besoin de trouver du sens dans leur travail.

Ils attachent par exemple une grande importance aux enjeux environnementaux. D’où sa décision de mettre en place des actions concrètes au sein de son établissement, comme la réorganisation de la cafétéria qui source désormais localement ses produits et la réduction du gaspillage alimentaire.

Il ne suffit pas d’attirer les talents mais de réussir à les fidéliser

La fidélisation des employés est l’un des principaux défis auxquels Matthieu a été confronté. L'année dernière, le taux de rotation du personnel atteignait 80%. Il a réussi à réduire cette tendance en prenant des mesures qui se sont avérées efficaces :

  • Mettre en place un onboarding plus poussé. Il a par exemple décidé de prendre le temps de déjeuner avec chaque nouvel employé

  • Recruter des managers séniors et une solide équipe de ressources humaines

  • Renforcer l'encadrement des équipes

  • Professionnaliser le processus de recrutement

  • Organiser des réunions régulières et des événements pour favoriser la communication et la cohésion au sein de l'hôtel

  • Efforts très importants sur les rémunérations : Benchmark régulier, remboursement sous conditions  des  Taxis, Parking ,  intéressement collectif attractif etc.

Toutes ces mesures ont contribué à fidéliser les employés. Selon Matthieu, bien qu’elles aient pris du temps à être mises en place, leurs résultats sont indéniables.

Enfin il rappelle l’importance d’être honnête avec les talents. Pour lui leur parler franchement, assumer d’être exigeant et être clair sur ses attentes est la clé pour établir une relation de qualité dès le départ.

Matthieu conclut son témoignage en rappelant que l’hôtellerie est une industrie qui valorise la méritocratie , où les talents , dont l’évolution est proportionnelle à leur implication, ont aussi leur rôle à jouer !

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